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Les policiers partent à la retraite à 61 ans dans le canton de Neuchâtel, en raison de la pénibilité du métier. Il faut toutefois faire ses comptes pour éviter les mauvaises surprises à 65 ans.

Les policiers neuchâtelois ne partent pas complètement à la retraite à 61 ans. En effet, ils reçoivent leur rente de retraite (2ème pilier) et ils disposent bien d’une rente pont-AVS versée par la caisse de pension, mais celle-ci n’est versée que durant 2 ans et non durant les 4 ans qui les séparent de l’âge de référence AVS de la retraite (65 ans pour les hommes et les femmes à partir de 2028). L’âge de référence des femmes est relevé progressivement de trois mois par année à partir du 1er janvier 2024. Cette particularité oblige quelques-un-e-s à continuer de travailler, mais dans un autre secteur, durant plusieurs mois ou années.

Coup d'œil dans le rétroviseur

Dans les années 90, le personnel de l’administration publique avait obtenu l’abaissement de la retraite ordinaire de 65 à 62 ans (-3 ans). Dans le même temps, la police cantonale neuchâteloise s’était vue refuser une diminution de l’âge de la retraite de 60 à 57 ans (-3 ans), car ses policiers disposaient d’un pont-AVS de 5 ans.

En 2010, a eu lieu la fondation de la caisse unique Prevoyance.ne, avec l’intégration des policiers au
plan dit des professions pénibles. Le pont-AVS a été abaissé à 2 ans lors de l’entrée en vigueur du nouveau plan PPP, dispositions particulières pour les titulaires de fonctions pénibles. Ces changements ont engendré une augmentation des cotisations, une diminution de rente pont-AVS et un calcul des rentes sur la moyenne des salaires cotisants depuis 57 ans. La Caisse a attribué un montant équivalent à 3 ans de pont-AVS (actualisé au taux technique) sur le compte des assurés policiers, ainsi qu’un montant visant à garantir la rente acquise lors du passage de dispositions plan de base => plan PPP.

En 2013, il y a eu la recapitalisation de la caisse de pension en vue d’obtenir un taux de couverture d’au moins 80% en 2052 afin de respecter les conditions fixées par la législation fédérale.

S’en est suivi en 2014, l’augmentation de l’âge de la retraite des fonctionnaires de 62 à 64 ans, la suspension de l’indexation des rentes, ainsi que l’augmentation de l’âge de la retraite de 60 à 61 ans pour les assurés PPP. Les négociations des syndicats policier avec l’État ont permis de retenir la proposition de n’augmenter l’âge de la retraite des policiers que d’une année, la deuxième année étant à la charge des assurés.

En 2015, il y a eu l’introduction d’une cotisation supplémentaire à hauteur de 1.3% et de l’épargne-temps, afin de permettre de partir à la retraite avant 61 ans.

En 2019, il y a eu une augmentation des cotisations et une baisse des prestations à la suite du changement de primauté. Les prestations sont désormais calculées en fonction de l’avoir de vieillesse constitué (bonifications + intérêts), multiplié par le taux de conversion lors du départ à la retraite. La Caisse a attribué des montants sur les avoirs de vieillesse des assurés proches de la retraite, afin de garantir leurs rentes, et des assurés de plus de 42 ans en raison de la baisse des espérances de rendement.

Il est important de relever que pour chaque modification, la CPCN a mis en place des dispositions transitoires, soit pour l’ensemble des assurés concernés en 2010, soit pour les assurés proches de la retraite.

Petit tour du côté des textes de loi

Mise à la retraite en général (art. 38 LSt) : Les titulaires de fonctions publiques sont mis d’office à la retraite à la fin du mois au cours duquel ils atteignent l’âge fixé par la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants, pour l’ouverture du droit à une rente de vieillesse simple :

  • 65 ans révolus pour les hommes (art. 21, al. 1, lettre a LAVS)
  • 64 ans révolus pour les femmes (art. 21, al. 1, lettre b LAVS)

Dès le 1er janvier 2024, ce sera 65 ans révolus pour les hommes et pour les femmes. On parle désormais d’âge de référence pour le départ à la retraite. Le versement d’une partie (20-80%) ou de la totalité de la rente de vieillesse pourra être anticipé à partir de 63 ans révolus ou ajourné jusqu’à l’âge de 70 ans. La rente de vieillesse anticipée sera évidemment réduite de la contre-valeur actuarielle de la prestation anticipée, c’est-à-dire que la rente de vieillesse sera plus faible tout au long de la retraite et que la réduction sera adaptée périodiquement à l’évolution des salaires et des prix. Les retraites anticipées jusqu’en décembre 2024 sont calculées avec les taux de réduction actuellement en vigueur, à savoir une réduction de 6.8% de la rente par année d’anticipation.

À partir de 2025, des taux de réduction réduits, échelonnés selon l’âge et le revenu moyen, s’appliqueront à la génération de transition (naissance entre 1961 et 1969). Pour les assurés plus jeunes, le taux de réduction en cas de perception de la rente de manière anticipée sera adapté à l’espérance de vie. Ces adaptations s’appliqueront toutefois au plus tôt à partir de 2027. Les nouveaux taux ne seront fixés par le Conseil fédéral que peu de temps avant leur introduction.

Selon le Règlement d’assurance de la Caisse de pensions de la fonction publique du Canton de Neuchâtel (CPCN), l’âge ordinaire de la retraite est fixé au premier jour du mois qui suit le 64ème anniversaire (art. 11 RAss). Les assurés peuvent faire valoir une retraite anticipée dès 58 ans ou reporter leur départ à la retraite jusqu’à 70 ans (avec l’accord de leur employeur).

Selon le régime ordinaire, le bénéficiaire d’une rente de retraite anticipée, ordinaire ou reportée qui n’a pas encore atteint l’âge de référence de l’AVS, peut demander le versement d’une rente pont-AVS (art. 38 RAss). Il s’agit d’une avance de la CPCN, versée en plus de la rente de retraite, au plus tard jusqu’à l’ouverture du droit à la rente de vieillesse ordinaire de l’AVS. Elle est compensée par une retenue de 4.8% opérée sur la rente de retraite par année de versement. Le montant de la rente-pont est fixé librement par l’assuré, mais il ne peut pas dépasser le montant annuel de la rente de vieillesse complète maximale de l’AVS (29’400.- / an), ni engendrer une retenue supérieure à la moitié de la rente de retraite.

Le Conseil d’État peut fixer un âge de la retraite inférieur pour des catégories particulières de titulaires de fonctions publiques (art. 40 LSt).Les policiers sont soumis à un régime particulier

Le personnel policier (sauf personnel administratif et technique) fait partie des fonctions pénibles et est mis à la retraite au premier jour du mois qui suit celui au cours duquel le collaborateur atteint l’âge de 61 ans (art. 16a, al. 1 RSt et art. 69 à 71 Rass).

Exceptionnellement, le personnel policier peut poursuivre son activité durant deux ans supplémentaires au maximum seulement si la marche du service le requiert (art. 16a, al. 2 RSt).

Le personnel policier bénéficie de dispositions particulières du règlement d’assurance appelées également plan PPP (pour pompiers, policiers et pilotes). Le plan PPP consiste à ce que le montant des bonifications de vieillesse (cotisations de l’assuré et de l’employeur, ratio 40/60) soit plus élevé de 3.5% que pour les assurés du plan de base afin de leur permettre de partir en retraite plus tôt. De plus, l’équivalent de deux années de pont-AVS calculées sur la rente annuelle maximale de 29’400.- est préfinancé. Ce pont-AVS n’engendre pas de retenue viagère.

Le personnel policier peut demander le versement d’une rente pont-AVS supplémentaire permettant de couvrir le temps le séparant de l’âge de référence AVS, mais cela sera compensé par une retenue de 4.8% opérée sur la rente de retraite par année de versement.

Un-e assuré-e PPP prend une retraite ordinaire à 61 ans et dispose de la part préfinancée de 58’800.-, quel que soit son âge d’entrée à la PONE, équivalente à deux années de pont-AVS (2’450.-/mois).

Deux cas de figure :

  • Il-elle souhaite le pont-AVS maximal (2’450.-/mois) et couvrir la durée complète le-la séparant du droit à la rente AVS, soit 4 ans. Le taux de retenue se monte à 9.6%, ce qui fait un montant de retenue de 235.20/mois sur la rente de retraite. Avec une moyenne de 20 ans de rentes pour les hommes, cette retenue occasionne un déficit de 56’450.- sur le montant des rentes de retraite touchées jusqu’au décès. Avec une moyenne de 24 ans de rentes pour les femmes, cette retenue occasionne un déficit de 67’740.- sur le montant des rentes de retraite touchées jusqu’au décès.
  • Il-elle souhaite un pont-AVS couvrant la durée complète le-la séparant du droit à la rente AVS, mais en répartissant uniformément la part préfinancée sur les 4 ans, soit 1’225.-/mois. Dans ce cas, l’assuré-e n’a pas de retenue sur sa rente de retraite, donc pas de perte, car il ne fait pas valoir de droit complémentaire au sens de l’article 38 RAss.

Attention, l’une ou l’autre de ces options nécessite une certaine anticipation de ses finances pour compléter ses revenus durant cette période. Certains n’ont pas d’autres choix que de reprendre un travail pour compléter leurs revenus provisoirement, avant d’atteindre 65 ans et de percevoir leur rente de vieillesse.

À noter encore que le personnel policier qui cesse de travailler doit continuer à cotiser pour le 1er pilier (AVS, AI, APG) jusqu’à atteindre 65 ans.

Cas particuliers

Pour les policiers qui n’ont pas fait toute leur carrière à la PONE, la situation est plus compliquée. Leurs précédentes occupations ne leur ont probablement pas permis de cotiser suffisamment pour partir à la retraite à 61 ans en conservant, dans une certaine mesure, leur niveau de vie antérieur. Pour une carrière complète, la CPCN alloue des prestations d’environ 45% du salaire de l’assuré. Pour une carrière plus courte, les prestations diminuent immanquablement. Afin de combler les lacunes de prévoyance, l’assuré peut effectuer des rachats volontaires de prestations tout au long de sa carrière et jusqu’à son départ à la retraite. Plus l’assuré rachète tôt dans sa carrière, plus l’effet de l’intérêt sera important. Les rentes futures s’en voient ainsi augmentées. Il existe un montant maximal du rachat autorisé. Celui-ci est indiqué sur votre fiche d’assurance CPCN. Jusqu’à 3 rachats sont admis par année et ils sont en principe totalement déductibles du revenu imposable. Pour les assurés ayant retiré une partie de leur avoir de vieillesse pour financer leur logement, il leur faut d’abord rembourser l’intégralité des retraits EPL (encouragement à la propriété du logement) avant de pouvoir effectuer des rachats.

Pour les policiers qui ont divorcé ou dont le partenariat enregistré a été dissout, la CPCN est appelée à partager l’avoir de vieillesse disponible lors du divorce. Les prestations qui en découlent, seront réduites en conséquence. Le montant de libre passage transféré à l’ex-conjoint peut être remboursé à la CPCN, de manière similaire aux rachats de prestation, sans devoir rembourser ses retraits EPL au préalable.

Deux profils, deux scénarios

Dans le cas d’un-e inspecteur-rice faisant toute sa carrière à la PONE, soit 35 ans depuis son arrivée (25 ans), jusqu’à l’âge de la retraite (61 ans), cet-te assuré-e PPP cotise en moyenne 2.55% en plus qu’un assuré soumis au régime normal.

  • Pour un-e inspecteur-rice en classe 7, chaque mois il-elle cotise en moyenne 175.- de plus qu’un assuré soumis au régime normal. Sur toute une carrière, cette part supplémentaire se monte à environ 73’500.-.
  • Pour un-e inspecteur-rice scientifique en classe 10, chaque mois il-est cotise 220.- de plus qu’un assuré soumis au régime normal. Sur toute une carrière, cette part supplémentaire se monte à environ 92’400.-.

Ces montants cotisés en plus servent principalement à financer les deux années de pont-AVS ainsi qu’à augmenter l’avoir de vieillesse. L’augmentation de l’avoir de vieillesse vise à obtenir une meilleure rente de retraite. En effet, le montant annuel de la rente de retraite reçue par un-e retraité-e correspond à son avoir de vieillesse multiplié par le taux de conversion, qui varie en fonction de l’âge de l’assuré lors du passage en retraite. Par exemple, le taux de conversion est de 4.97% pour un départ à la retraite à 61 ans et il est à 5.41% pour un départ à la retraite à 64 ans.

Les cotisations (part patronale et des salariés) du régime du plan PPP visent à ce que l’assuré, partant à la retraite à 61 ans, obtienne une retraite équivalente à celle d’un assuré soumis au régime normal, qui a un salaire similaire et qui prend sa retraite à 63 ans.

Problème, les assurés soumis au régime normal partent à la retraite à 64 ans et ont donc une année supplémentaire de cotisation assuré/employeur (entre 63 et 64 ans) engendrant des rentes de retraites plus élevées qu’un assuré soumis au plan PPP. Afin d’obtenir des prestations similaires, les assurés du plan PPP (et non l’employeur) doivent prendre en charge le financement supplémentaire. La majoration de cotisation par rapport aux dispositions de base pour les employeurs est de 1.75% et pour les assurés de 2.55%. La différence (en tenant compte du financement à 60% employeur / 40% assuré) correspond à l’année d’anticipation.

Cela crée donc une différence entre les fonctionnaires soumis au régime normal et les fonctionnaires de police bénéficiant du plan PPP. Dans certains services publiques neuchâtelois affiliés à la CPCN, comme à la Ville de Neuchâtel et à la Ville de La Chaux-de-Fonds, ainsi qu’à Viteos ou encore au SCAN, l’employeur prend en charge une année, voire plus, de rente pont-AVS pour ses fidèles employés. La Ville de Neuchâtel le fait sous forme d’un apport sur l’avoir de vieillesse, tandis que d’autres préfèrent prendre en charge la rente pont-AVS.

Cotiser plus pour améliorer sa qualité de vie à la retraite

Il faut être conscient que chaque assuré est responsable de sa retraite. Il lui incombe de prendre les mesures nécessaires pour combler des lacunes de prévoyance et s’assurer des moyens supplémentaires durant sa retraite en souscrivant, par exemple, un 3ème pilier auprès d’une banque ou d’une assurance. Le sujet est complexe et chaque cas est différent, mais une chose est certaine : cotiser plus permet d’améliorer sa qualité de vie à la retraite.

La CPCN propose à tous ses assurés un plan Epargne+ qui consiste en une cotisation épargne supplémentaire de 1% de l’assuré, directement créditée à son avoir de vieillesse et lui permettant ainsi d’améliorer ses prestations (rente de retraite, rente d’invalidité, rente de conjoint survivant et rente d’enfant). Vous trouverez un simulateur sur le site de la CPCN afin de comparer vos cotisations et prestations avec ou sans le plan Epargne+. Tous les assurés souhaitant adhérer ou renoncer au plan Epargne+ peuvent le faire chaque année avec effet au 1er janvier suivant, en remplissant un formulaire avant le 31 octobre.

Pour faire les bons choix en fonction de sa situation personnelle, il est vivement conseillé de suivre la formation Etat de 3 jours « La retraite : s’y préparer pour la vivre pleinement » 1 à 2 ans avant sa retraite et de ne pas hésiter à contacter un conseiller de la CPCN pour des questions personnelles ou pour établir des projets de rachats.

Pour un éclairage plus large sur la gestion de ses finances à tout âge, nous vous conseillons l’ouvrage Guide pratique de vos finances personnelles de Fabien Fontecave et Albert Gallegos aux éditions Favre, un guide pratique et didactique permettant d’opter pour des choix financiers personnalisés afin de planifier et d’appréhender le futur plus sereinement.